Suaire mensonger
Ses pas finalement l'avaient menée à l'endroit tant attendu, à celui qu'elle cherchait parmi tout ce bordel interminable de bâtisses. Même si elle ne semblait affectionner particulièrement Nueva, ses pas sur ce continent allaient s'avérer plus qu'utiles en espérant ne pas être desappointée. Devant elle se tenait les indications brèves et hyeroglophiques qu'on lui avait données et heureusement l'individu ne l'avait pas roulé dans la farine - cela aurait été fâcheux de le retrouver dans tout le continent dans le simple but de l’éviscérer lui et sa femme mais cela aurait été une procédure nécessaire pour éviter la récidive. Sans un mot le dragon observa la pancarte rongée par les termites et le lierre qui ne semblait plus vouloir dire grand chose de prime abord, mais cette atmosphère tendue et propice au mysticisme, au surnaturel - presque métaphysique contrastait affreusement mal avec l'ambiance de la ville. Ainsi, il fallait être idiot pour ne pas que tous ces facteurs ne prouvent la présence d'un individu comme celui-ci à Nueva, même s'il était caché dans les rues les plus désertes, et éloigné de la mélasse citadine.
Il fallait avouer que l’entrée de la petite boutique était bien cachée à l’écart des autres et surtout dans une des rues les moins fréquentées. Mais cela ne suffisait pas pour arrêter Aerith - on l’avait particulièrement bien fournie en information, le bouche à oreille étant la meilleure façon de répandre une rumeur. Hélas pour l’hôte de cette adorable bâtisse, les informations étaient tombées entre les griffes d’Aerith et elle était bien curieuse de voir les talents d’un All’ombra - créatures ma foi bien discrètes et surtout anciennes. Elle en avait connu quelques uns. Quelques uns étaient morts, d’ailleurs.
Elle avait observé quelques moments le petit habitacle d’un oeil curieux, se grattant la base de la corne, enfoncée dans son crâne. Elle jeta par-dessus son épaule un sac en tissu qui semblait débordé - de la matière semblait se former ce qui ressemblait à des pièces et parfois même des formes plus grosses, comme des cristaux. Tout travail méritait d’être payé, et elle était aussi bien au courant que l’argent faisait parler les gens bien plus qu’ordinaire. Elle espérait simplement ne pas se faire rouler dans la farine par un charlatan, auquel cas elle risquerait d’être un peu agacée d’avoir fait tout ce chemin pour rien. Elle se décida enfin de pénétrer dans l’endroit, poussant la porte qui actionna une petite clochette à l’intérieure. Aerith s’était légèrement courbée afin de pouvoir entrer dans la pièce, la dimension de la porte semblant adaptée à des gens de plus petite mesure. Ses yeux dans un premier temps avaient observés l’endroit - si l’extérieur ne payait pas de mine l’intérieur semblait être joliment décoré et littéralement plutôt bien garni. Les étagères étaient remplis de livres poussiéreux, et la lumière était tamisée et relaxante - du moins le dragon supposait qu’elle était censé l’être. C’est seulement après que ses orbes aient détaillées chaque recoin qu’elle dédaignait de refermer la porte et d’accorder un regard à celle qui trônait en maîtresse ici, une jeune femme frêle et pâle assise derrière une table ornée de jolies décorations à la fois sobres et sophistiquées. Elle se trouvait derrière un rideau à peine opaque, comme si une barrière semblait la séparer de ce monde et de l’autre.
Sans plus attendre et sans un mot Aerith s’était dirigée en sa direction ; se positionnant sans vergogne aucune en face d’elle et prenant place sur le coussin placé en vis-à-vis de celui où trônait la voyante. Son poids s’écrasant contre la matière créa une légère secousse sur le parquet, et Aerith déposa son sac à côté d’elle. Ses yeux féroces se plantaient à présent directement dans ceux de la jeune femme qu’elle ne se gêna pas de dévisager avec une grande attention. Elle rabattit d’ailleurs ses ailes afin qu’elles ne prennent grande place. Elle possédait en effet un physique terriblement atypique qui dégageait assurément quelque chose que les autres ne parvenaient à émaner ; une aura ancienne et mystérieuse. Elle s’attarda un instant sur l’uniformité de son être et les traits délicats de sa face qui pourtant semblaient dégager une immense fragilité. D’ailleurs, elle ne semblait pas particulièrement éminente, ses membres étaient fins et son ossature suintait la faiblesse. Elle semblait si facilement destructible. Elle plissa les yeux en constatant les nombreux bijoux qu’elle portait, espérant qu’ils n’étaient pas synonyme de cupidité.
« C’est toi la diseuse de bonne aventure, pas vrai ? J’ai eu ouï dire de tes prouesses, sourit-elle malicieusement en desserrant le fil qui retenait son sac, dévoilant ainsi au sein de ce dernier une quantité d’or et de cristaux dépassant excessivement la mesure, je suis prête à beaucoup te payer pour tes services. »