Does this unit have a soul
« L'après-midi était déjà bien avancée et le soleil, encore haut dans le ciel, allongeait subtilement les ombres nonchalantes de la ville grise et métallique de Keivere. Plantés là comme en d'immenses colosses de pierre éclatante, les bâtiments majestueux de l'Empire se dressaient en sentinelles austères vers les cieux lointains et dégagés. L'atmosphère était pleine de la nostalgie d'un été qui déjà s'en était allé, laissant la place à un temps beau mais frais, propice aux dernières balades estivales avant l'automne et les prémices du froid nordique. Ç'avait été une journée idéale pour sortir et faire une promenade avec Thomas, parcourir les parcs entretenus de l'Empire et le laisser se défouler sur les vastes étendues d'herbe. Jouissant de quelques jours de permission, Sieghart profitait de cette liberté temporaire pour se défaire de cet uniforme qui était comme une deuxième peau, pour se libérer l'esprit et consacrer ses efforts à autre chose, c'est à dire principalement des activités que d'aucuns trouveraient d'une banalité affligeante mais qu'il n'avait pas spécialement le loisir de faire quand il était en service.
Habillé en civil d'une façon tout à fait quelconque, le seul élément notable était la présence d'un pistolet de petit calibre dissimulé dans un holster d'épaule sous sa veste, invisible à moins d'ôter cette dernière. Précaution d'usage imposée pour les officiers proches du pouvoir militaire. S'il est vrai que Sieghart reconnaissait la pertinence de l'argument, cela provoquait toutefois en lui une certaine contrariété agacée dans des situations comme celle-ci où il avait à gérer une arme et un enfant.
Thomas sur ses épaules un ballon entre les mains, Sieghart le tenait par les pieds tandis qu'ils rentraient en remontant un petit quartier populaire et animé. Ce n'était pas vraiment le chemin le plus rapide pour retourner à la maison, loin de là en fait, mais ça faisait une éternité que le jeune homme n'était pas venu ici et ce n'était pas très loin de l'endroit où il avait grandi quand il était petit, avant qu'il ne s'engage dans l'armée et ne fasse déménager, plus tard, sa mère dans un endroit où elle serait bien mieux que dans un taudis. Toutefois, rien n'était plus comme ce qu'il avait connu. Il y avait bien un ou deux éléments qui n'avaient pas changé - un pont, une rue - mais ce qu'était devenu le quartier lui était maintenant majoritairement étranger.
Déambulant ici et là, il essaya de retrouver l'endroit qui lui avait servi de maison, si on avait pu appeler ça comme ça, mais force est de constater qu'ils avaient rasé en masse pour une raison quelconque avant de reconstruire par dessus. Il se rappelait la misère que l'endroit avait été, et une certaine nostalgie pleine d'amertume lui laissa un goût indésirable en bouche. Certaines sensations, certains échos, flottaient là comme des réminiscences à portée de main. Le spectre de sa mère et de son frère y transparaissaient vaguement en filigrane, ces rares souvenirs flous qu'il gardait d'eux ensembles. Il avait quitté tout ça à ses seize ans pour s'engager dans l'armée, pour aliéner sa liberté contre la promesse d'une solde qui lui semblait alors le bout du monde. Il avait accepté de risquer sa vie pour qu'ils n'aient plus jamais à rester ici. Mais tout ceci était du passé. Il n'y avait plus rien qui l'y liait encore désormais. C'était un sentiment étrange.
_ Papa tu m'offres une glace ?! »
Levant les yeux vers le monstre, celui-ci pointait la devanture d'un petit bar restaurant qui vendait crêpes et autres en-cas d'après-midi.
_ Si tu veux. »
Modifiant sa trajectoire avec une nonchalance pleine de flemme, c'est vrai que ça faisait longtemps qu'il n'avait - lui-même - pas mangé de glace. En même temps, ce n'était pas spécialement la spécialité des repas de l'armée. D'allure simple quoi que cosy à l'intérieur, l'Anthracite n'était pas très rempli à cette heure de la journée à part quelques habitués et une clientèle occasionnelle comme lui.
_ Tiens choisis ce que tu veux. »
Débarquant Thomas de ses épaules, il le reposa par terre avant de se redresser pour faire face à un barman large comme son bar et avec une barbe de bucheron.
_ Bienvenue bienvenue. Alors, qu'est-ce que je sers à ces messieurs ? »
_ Bonjour. Je vais vous prendre, hm, un café s'il vous plaît. Et... »
Jetant un œil à son fils, celui-ci semblait visiblement impressionné par la taille du barman. L'encourageant d'un sourire à mi chemin entre l'espiègle et l'amusé, la réponse mit quelques secondes à arriver.
_ Une glace. Au chocolat. »
Appuyant un peu plus son regard en haussant les sourcils, Sieghart attendait aussi autre chose.
_ S'il te plaît. Monsieur. »
Intérieurement, Sieghart faisait beaucoup d'efforts pour ne pas devenir gaga, mais il était quand même fier de son petit chaton, même si c'était évidemment le sentiment le plus subjectif et biaisé au monde.
_ Tout de suite petit monsieur, mettez-vous à l'aise je vous apporte ça. »
S'asseyant sur un des tabourets hauts du comptoir pendant que Thomas grimpait sur le sien, Sieghart prit le temps de détailler un peu plus son environnement. Ce n'était pas très grand et était très éloigné du faste et de l'ostentatoire de ce qu'on trouvait au centre de la cité mais ça avait ce petit côté simple et rude qui faisait son charme et dans lequel il se trouvait bien plus à l'aise que dans ces établissements guindés de la haute. »
Habillé en civil d'une façon tout à fait quelconque, le seul élément notable était la présence d'un pistolet de petit calibre dissimulé dans un holster d'épaule sous sa veste, invisible à moins d'ôter cette dernière. Précaution d'usage imposée pour les officiers proches du pouvoir militaire. S'il est vrai que Sieghart reconnaissait la pertinence de l'argument, cela provoquait toutefois en lui une certaine contrariété agacée dans des situations comme celle-ci où il avait à gérer une arme et un enfant.
Thomas sur ses épaules un ballon entre les mains, Sieghart le tenait par les pieds tandis qu'ils rentraient en remontant un petit quartier populaire et animé. Ce n'était pas vraiment le chemin le plus rapide pour retourner à la maison, loin de là en fait, mais ça faisait une éternité que le jeune homme n'était pas venu ici et ce n'était pas très loin de l'endroit où il avait grandi quand il était petit, avant qu'il ne s'engage dans l'armée et ne fasse déménager, plus tard, sa mère dans un endroit où elle serait bien mieux que dans un taudis. Toutefois, rien n'était plus comme ce qu'il avait connu. Il y avait bien un ou deux éléments qui n'avaient pas changé - un pont, une rue - mais ce qu'était devenu le quartier lui était maintenant majoritairement étranger.
Déambulant ici et là, il essaya de retrouver l'endroit qui lui avait servi de maison, si on avait pu appeler ça comme ça, mais force est de constater qu'ils avaient rasé en masse pour une raison quelconque avant de reconstruire par dessus. Il se rappelait la misère que l'endroit avait été, et une certaine nostalgie pleine d'amertume lui laissa un goût indésirable en bouche. Certaines sensations, certains échos, flottaient là comme des réminiscences à portée de main. Le spectre de sa mère et de son frère y transparaissaient vaguement en filigrane, ces rares souvenirs flous qu'il gardait d'eux ensembles. Il avait quitté tout ça à ses seize ans pour s'engager dans l'armée, pour aliéner sa liberté contre la promesse d'une solde qui lui semblait alors le bout du monde. Il avait accepté de risquer sa vie pour qu'ils n'aient plus jamais à rester ici. Mais tout ceci était du passé. Il n'y avait plus rien qui l'y liait encore désormais. C'était un sentiment étrange.
_ Papa tu m'offres une glace ?! »
Levant les yeux vers le monstre, celui-ci pointait la devanture d'un petit bar restaurant qui vendait crêpes et autres en-cas d'après-midi.
_ Si tu veux. »
Modifiant sa trajectoire avec une nonchalance pleine de flemme, c'est vrai que ça faisait longtemps qu'il n'avait - lui-même - pas mangé de glace. En même temps, ce n'était pas spécialement la spécialité des repas de l'armée. D'allure simple quoi que cosy à l'intérieur, l'Anthracite n'était pas très rempli à cette heure de la journée à part quelques habitués et une clientèle occasionnelle comme lui.
_ Tiens choisis ce que tu veux. »
Débarquant Thomas de ses épaules, il le reposa par terre avant de se redresser pour faire face à un barman large comme son bar et avec une barbe de bucheron.
_ Bienvenue bienvenue. Alors, qu'est-ce que je sers à ces messieurs ? »
_ Bonjour. Je vais vous prendre, hm, un café s'il vous plaît. Et... »
Jetant un œil à son fils, celui-ci semblait visiblement impressionné par la taille du barman. L'encourageant d'un sourire à mi chemin entre l'espiègle et l'amusé, la réponse mit quelques secondes à arriver.
_ Une glace. Au chocolat. »
Appuyant un peu plus son regard en haussant les sourcils, Sieghart attendait aussi autre chose.
_ S'il te plaît. Monsieur. »
Intérieurement, Sieghart faisait beaucoup d'efforts pour ne pas devenir gaga, mais il était quand même fier de son petit chaton, même si c'était évidemment le sentiment le plus subjectif et biaisé au monde.
_ Tout de suite petit monsieur, mettez-vous à l'aise je vous apporte ça. »
S'asseyant sur un des tabourets hauts du comptoir pendant que Thomas grimpait sur le sien, Sieghart prit le temps de détailler un peu plus son environnement. Ce n'était pas très grand et était très éloigné du faste et de l'ostentatoire de ce qu'on trouvait au centre de la cité mais ça avait ce petit côté simple et rude qui faisait son charme et dans lequel il se trouvait bien plus à l'aise que dans ces établissements guindés de la haute. »